Je vais essayer de compléter au fur et à mesure de mes souvenirs les marques qui sont pour moi ceux d'un féminisme naissant mais qui ne se nomme pas:
Je pense que mon féminisme découle de plusieurs faits (cf Enfant, j'étais déjà féministe ( I ) ) et notamment de l'acceptation de mon homosexualité.
- de janvier à juin 2007, je suis avec passion la campagne pour les présidentielles. Je suis en Guyane et je lis le canard enchaîné. Le sexisme de la campagne de Sarkozy passe parfaitement surtout quand il fait parler à sa place les femmes du parti. MAM décrit le "changement d'idées autant de robes" ... J'étais scandalisée d'une manière générale de l'aveuglement des Français sur la réalité du personnage qui parle de la masse populaire et même s'approprie les idées de la gauches avec un cynisme déconcertant. Lui, l'ami des riches entrepreneurs, qui se faire des couilles en or avec des histoires assez louches... bref ! A ce moment, je me dis "c'est sexiste" mais je ne vais pas plus loin dans l'analyse. C'est cette hypocrisie, ce machisme qui va durant les 6 derniers mois de la campagne me faire soutenir Ségolène Royal même si elle n'était pas pour moi la candidate rêvée. Pour moi, l'honnêté et la sincérité n'est pas chez lui. Elle invente un mot ? on lui tombe dessus ! Il invente un mot ? rien.
Elle se trompe ? On lui tombe dessus. Lui ? Mais non ! Sans parler de la peur qu'inspirait l'ancien ministre de l'intérieur -"je vais tous vous virer!" dit-il à france 3-, la campagne a été machiste; les médias aussi -sans parler de ce cher journaliste à grande responsabilité d 'Europe 1 dont le nom m'échappe qui casse du sucre sur elle-... Quand on parle de "la Barbie et de la Barbante" au congrès de Reims de novembre 2008, il y a à s'inquiéter du peu de progrès fait au sein du PS et dans le monde politique en général.
- septembre 2007: je fais mon coming out professionnel. Les langues se délient un peu à l'école vu que j'ai banalisé mon orientation sexuelle. Peu de résistances et d'opposition en apparence. Ce qui m'aide beaucoup à l'époque.
- vers oct-nov 2008, je discute sur un forum de jeunes artistes que je connais (8 à 10 ans plus jeunes que moi) non complexés par la sexualité, par l'orientation sexuelle et par le genre. Je commence à réfléchir... Simone de Beauvoir est alors citée...
- novembre 2008: je tombe par hasard sur une émission de France Inter sur l'homophobie, ce qui fait écho à des réflexions écrites ou lues sur le forum ... Le dictionnaire de l'homophobie est citée comme référence. Cette émission s'inscrit dans une analyse plus profonde: du racisme, antisémitisme, misogynie et anti-américanisme. La lecture du dictionnaire de l'homophobie est primordiale.
- de décembre 2008 à avril 2009, avant que je prenne conscience de la vigueur du féminisme et prenne connaissance de l'histoire des femmes et du genre:
Je m'indignai contre un poème qui confortait l'idée que les jouets étaient différents selon les sexes (période de Noël oblige ...). Je décidai néanmoins de le donner parmi d'autres -au choix donc- à mes élèves. Il faut majoritairement pris par ceux-ci. Je me rendis compte que les enfants avaient déjà en tête une image de la fille et du garçon et de ce que avec quoi ils doivent jouer ... Une classe avec beaucoup de filles et beaucoup de "princesses"; quelques garçons -des petits durs- mais aussi comme chaque année, quelques (rares) enfants qui ne rentraient pas dans ces stéréotypes ... mais je pris cela un peu comme une fatalité...
Je me révoltai contre des blagues sexistes envoyées par mail, des montages vidéo censés (dé)montrer, sous couvert d'humour bien sûr, que les femmes ne savent pas (bien) conduire et sur le blog qui mettait en ligne cette vidéo, j'exprimais mon désaccord grâce certains arguments -cela dura toute une journée tout au long d'une joute par commentaires interposés, la mauvaise foi me choqua-.
Je m'élevai à l'école pour la féminisation des mots et leur poids plus que symbolique -autour du 8 mars-: c'est la résistance de certaines collègues femmes qui m'amena à ce que je cherche, je m'informe; avec un collègue remplaçant, je discutai de la loi salique et du "pauvre mari de la reine d'Angleterre" qui, me disait-il, n'est rien. Je lui répondis alors que c'était le cas de toutes les femmes de France ;-) Le "mari de", équivalent de "femme de"... et je ne fis pas de remarque sur l'emploi du mot "femme" qui est double; synonyme d'épouse.
"La femme de quelqu'un" comme "la chose de quelqu'un"?
Pour l'homme marié, on dit très majoritairement "mari" et non "homme" ou alors il y a une charge assez familière, affectueuse voire humoristique ("mon homme"). Pas dans "ma femme".
Comme si "la femme" était la propriété de "l'homme". Ce que j'écris sur ces mots est récent mais on distinguera que l'homme, c'est à la fois l'être humain et le mâle de cette espèce. A force d'utiliser le mot général, on fait la confusion avec le mot particulier. Ce que le latin ne faisait pas ("homo", l'espèce et "vir", le mâle).Le masculin neutre oublie tout simplement la femme. Les droits de l'homme de 1789 ne parle que du mâle et d'un mâle blanc. On donne un autre nom pour la "femelle, la femme de l'espèce, -qui vient du latin "qui allaite"- et par contre, c'est le même mot pour l'"épouse" de l'homme. Lui, il est alors le "mari". Certes, il a le mot "épouse" mais au quotidien, c'est le mot "femme" qui est le plus usité.
Cette "femme" quand elle n'est pas encore "épouse" est plutôt une "fille", une "mademoiselle" car elle n'a pas encore le statut de "madame". changement statut donné donc par le mariage avec "monsieur", lequel peut être appelé ainsi quand il veut, quelque soit son âge, puisqu'il n'existe pas de "mondamoiseau" ...
Je me suis faite appelée récemment "jeune fille": à 34 ans, je pourrais bien le prendre comme beaucoup de femmes coquettes mais non : je reprends la personne alors. Sur la défensive à celui qui cherche à m'agresser et par là même à me minorer. Je vais d'ailleurs tenter de réprimer toute la haine que j'ai à l'encontre de ce "gros con" -ça m'emmerde bien d'utiliser un mot qui désigne le sexe féminin mais le sexisme de la langue est ainsi ... salaud ou salopard n'a pas la même utilisation et signification. La "connerie" étant souvent une définition dans l'identité de la personne alors que les deux autres termes renvoient plus selon moi aux actes ... et pour lui, hélàs, il s'agit bien d'identité ...
La deuxième, je répondis avec le sourire à un monsieur aimable que je ne connaissais pas qui cherchait simplement à dragouiller un peu: je lui répondis ainsi avec le sourire à son "les filles" par "le garçon"; il me répondait alors un peu gêné, par un "jeune fille", je lui dis "non plus" mais on s'arrêta là car il partait ... Deux collègues femmes ne me m'appuyèrent pas du tout : incompréhension et minoration de ma réaction ...
Triste ...
Quand on souligne le sexisme des mots, on se retrouve face à de l'incompréhension : les femmes minorent, sont choquées et les hommes sont au mieux surpris, déstabilisés.
Une femme qui n'accepte pas un mot qui la rajeunit est une rabat-joie "sûrement une lesbienne !". Faux. Je suis certes lesbienne mais ce qui me fait répondre est le fait que je suis féministe, à savoir une femme qui a ouvert les yeux et qui les garde ouverts !! Mais je sais encore que cette phrase quelque peu provocante indignera ... Mais quand on discute entre femmes, quand on parle sérieusement de ce sexisme quotidien, celui-ci tombe vite dans l'oubli -comme je l'ai fait pendant 33 ans et demi ...- ou celui-ci est minoré, caricaturé voire méprisé -les femmes vont de superbes antiféministes...- !
Remarque auprès de mes collègues sur le manque de symétrie dans notre société (cf Don Juan/ salope; le poids des mots ...).
La lecture de quelques livres Dictionnaire de l'homophobie; l'histoire du féminisme; Hommmes et femmes, construction d'une différence m'éclaira beaucoup ... La résistance de certaines collègues femmes m'aida paradoxalement beaucoup... (je les ai déjà remerciées !). Disons le, le sexisme d'une en particulier. Le poids des croyances aussi (cf mayo, vin et autres choses qui tourneraient à cause ... des règles des femmmes !!!! J'étais tombée sur le cul !)
Début mars, en visite à Paris et intéressée par l'Afrique, je me rendis au musée Dapper dont l'expo portait sur les Femmes dans les arts d'Afrique; j'achetai le livre d'expo et poursuivai à mon retour mon intérêt en regardant un docu de la cinquième sur des femmes d'Afrique.
C'est aux vacances d'avril, parce que je cherchais, me semble-t-il, à me procurer le livre de Louis Georges Tin -qui avait dirigé le dictionnaire de l'homophobie qui avait été si éclairant- sur la naissance de l'hétérosexualité au Moyen age que je pris conscience et connaissance d'un champ de recherche en Histoire sur l'histoire des femmes. J'arrivais sur le site de l'université de Toulouse et, moi qui avait toujours été intéressée par la reprise des études, la contactai et reçut de Sylvie Chaperon -spécialiste de Simone de Beauvoir- le conseil de m'adresser à l'Université d'Angers et le nom de Christine Bard apparut très vite. Pendant ces deux semaines de vacances, je surfai sur le web et le monde me tomba dessus !
J'écrivais au secrétariat d'Angers pour avoir des infos. La secrétaire me répondit vers la fin des vacances en disant qu'elle en avait parlé à Christine Bard et que je pourrais suivre des cours de Master1 avec dispense d'assiduité. Surprise. C.Bard était déjà au courant de mon projet, moi qui me sentais déjà un peu submergée par toutes ces connaissances et pas prête ... Néanmoins, comme j'avais lu sur elle -je commençais d'ailleurs à investir dans ma petite bibliothèque des féminismes-, j'osais lui écrire en prenant un week end pour formuler du mieux possible mon projet. Trente minutes après l'envoi du mail, elle me répondait favorablement et ceci lança encore plus le bouleversement que j'avais connu pendant les deux semaines de vacances !
Sur mon blog Karinette en Charente, on peut percevoir une partie de cette prise de conscience qui commence à la mi-décembre 2008. Je mets des mots sur des ressentis; je développe ensuite les ressentis en étant plus attentive à la société -pour dire vite. Avril et les deux semaines de vacances plongent cet intérêt plus poussé dans le champ des connaissances universitaires et intellectuelles.
Impossible de faire marche arrière : j'ai vu de la lumière, je suis entrée et pour rien au monde, je ne ressortirai dans la nuit sombre et obscure ...
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