jeudi 8 octobre 2009

M. Leonetti maintient mais édulcore le statut du beau-parent

M. Leonetti maintient mais édulcore le statut du beau-parent
LE MONDE | 08.10.09 | 08h50 • Mis à jour le 08.10.09 | 12h02


Il voulait, disait-il, "apaiser les esprits" : en avril, face à la fronde d'une partie de la majorité, le député (UMP) Jean Leonetti avait été chargé de "dédramatiser" le débat sur le statut des beaux-parents. La réforme défendue par la secrétaire d'Etat à la famille, Nadine Morano, avait en effet soulevé une controverse au sein même de la majorité. Soutenus par Christine Boutin, des députés UMP estimaient que ce texte menaçait la famille traditionnelle et ouvrait la voie à une "reconnaissance détournée de l'homoparentalité".
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Au terme de cinq mois de travail et d'une cinquantaine d'auditions, M. Leonetti estime finalement que ce projet "ne présente pas le danger que certains lui attribuent". Le député propose donc le maintien de la principale disposition du texte – l'instauration d'une convention permettant de partager l'autorité parentale avec un tiers –, tout en plaidant en faveur d'un aménagement : il faudrait, estime-t-il, que cette convention soit précédée d'une médiation.

TROIS FOYERS SUR DIX

En France comme dans la plupart des pays européens, les familles recomposées sont de plus en plus nombreuses : selon l'Institut national d'études démographiques (INED), leur nombre a progressé de 10 % de 1990 à 1999. A cette date, 1,6 million d'enfants vivaient dans un ménage recomposé et 2,7 millions avec un seul parent. Trois foyers sur dix ne "correspondent pas à la forme traditionnelle de la famille", résumait la démographe Corinne Barre dans Histoire de familles, histoires familiales (INED, 2005).

A ces recompositions, se sont ajoutées, ces vingt dernières années, les familles homoparentales. Lesbiennes ayant recours à des inséminations artificielles en Belgique, gays ayant recours à la gestation pour autrui à l'étranger, coparentalités réunissant un couple d'hommes et un couple de femmes : aujourd'hui, 30 000 enfants selon l'INED, 200 000 selon l'Association des parents et futurs parents gays et lesbiens, sont élevés par un couple homosexuel.

Ces "tiers" qui ne sont pas reconnus par le droit sont de plus en plus nombreux, mais ils sont loin de s'impliquer tous de la même manière. Certains beaux-parents se contentent de côtoyer quelque temps un enfant, d'autres inventent une relation durable qui survit à la séparation du couple. Le projet de loi demandé par Nicolas Sarkozy se refusait donc à créer un statut s'appliquant indifféremment à tous les "tiers". Il se contentait de proposer des outils.

Le premier consistait à étendre au "tiers" – qu'il s'agisse d'un beau-père ou d'un homoparent – la présomption d'accord qui existe déjà entre les parents pour les actes usuels de la vie quotidienne : l'accompagnement d'un enfant à l'école ou chez le médecin. Il fallait pour cela clarifier la définition légale des actes usuels, ce que M. Leonetti juge inutile et dangereux.

Le deuxième outil était l'assouplissement de la délégation – partage de l'autorité parentale. Inventée en 2002 par Ségolène Royal, cette mesure permet de reconnaître le rôle éducatif d'un adulte qui a tissé des liens affectifs étroits avec un enfant qui n'est pas le sien. Ce partage ne crée aucun lien de filiation, il n'autorise ni la transmission du nom ni celle des biens, mais il permet à un beau-parent, ou, plus souvent à un homoparent, de participer à l'éducation d'un enfant jusqu'à ce qu'il fête ses 18 ans.

Pour faciliter la vie des familles homoparentales et recomposées, le gouvernement proposait de remplacer l'actuelle requête devant le juge aux affaires familiales, souvent longue et compliquée, par la simple homologation, par le magistrat, d'une convention. Dans son rapport, M. Leonetti ne se dit pas hostile à cet assouplissement mais y pose deux conditions : que la convention soit rédigée avec l'appui d'un médiateur et qu'elle soit justifiée par les "besoins d'éducation de l'enfant".

Le troisième outil concernait le maintien des liens entre le fameux "tiers" et l'enfant. Lorsque des "liens affectifs étroits" se sont noués, le gouvernement proposait que l'enfant puisse, s'il le souhaite, continuer à avoir des relations avec son beau-parent, sa demi-sœur ou son "homoparent", voire, à titre exceptionnel, lui être confié en cas de décès du père ou de la mère. M. Leonetti se montre plus que réservé sur cette réforme : elle risque, selon lui, d'introduire une dangereuse instabilité dans la vie de l'enfant.
Anne Chemin

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