Sports 21/08/2010 à 00h00
Caster Semenya, raccord en genre et retour en piste
800 mètres. La championne, devenue un symbole en Afrique du Sud, a été reconnue hermaphrodite par la fédé. Elle court dimanche à Berlin.
Retour sur les lieux de la consécration et des interrogations. La Sud-Africaine Caster Semenya retrouve dimanche lors du meeting de Berlin la piste du Stade olympique où, l’an dernier, elle avait remporté le titre mondial sur 800 m et suscité par son chrono et sa morphologie une polémique sur son genre sexuel. Femme ou homme ? Le temps de trancher la question, la Fédération internationale d’athlétisme (IAAF) l’avait suspendue, sans pour autant la priver de son titre. Après onze mois de controverses, de tests et de rumeurs, Semenya est aujourd’hui considérée comme «hermaphrodite» mais l’IAAF l’a autorisée en juin à concourir parmi les femmes. Sur un potentiel «traitement» pour diminuer son taux de testostérone qu’elle aurait l’obligation de suivre, l’IAAF n’a fait aucune déclaration officielle.
Attraction. Depuis la levée de sa suspension, Semenya, 19 ans, a disputé deux courses le mois dernier en Finlande en plus de 2’02", loin de son temps de 2009 (1’55"45). Elle sera l’attraction à Berlin, son premier rendez-vous important, même si la réunion ne fait plus partie des grands meetings européens.
Vendredi, toujours aussi timide et réservée elle a parlé à la presse : «Cette période sans compétition n’a pas été positive, mais j’ai passé beaucoup de temps avec ma famille, mon entraîneur et mes partenaires d’entraînement. Peut-être que cela va m’aider à courir encore plus vite.» Et l’IAAF, les tests de féminité ?«Je ne veux pas parler de l’IAAF, je ne parle pas des gens plus grands que moi. Pour tout ce qui est médical, contactez-les.»
A Johannesburg, le visage anguleux et le buste imposant de la jeune fille sont toujours affichés dans les rues et dans les bars branchés de la jeunesse noire. Pour les Sud-Africains, Semenya est devenue un symbole de la lutte contre le racisme. A son retour de Berlin, il y a un an, l’athlète avait été accueillie en héroïne. «Sa réussite est le symbole de l’espoir pour toutes les jeunes filles noires de ce pays», déclarait pompeusement la présidente des femmes de l’ANC, Nosipho Ntwanambi. Médias, hommes et femmes politiques, artistes s’étaient tous unis pour la cause de cette femme «humiliée et offensée». «Voulez-vous qu’elle baisse son pantalon ?» titrait un journal alors que sa mère distribuait aux médias les numéros de téléphone de camarades «qui l’avaient vue nue sous la douche, et pourraient témoigner.»
Traumatismes. Sa suspension a réveillé des traumatismes raciaux de la société noire sud-africaine. Selon Achille Mbembé, professeur à l’université de Johannesburg et spécialiste de la question raciale, l’affaire Semenya «rappelle avec douleur la manière dont le corps noir a été traité dans ce pays.» Au XIXe siècle, Saartjie Baartman, une femme de l’âge de Semenya, avait été envoyée en Europe et son corps exposé au public et examiné par des scientifiques.
Malgré l’engouement national derrière la «fille en or», la vie de ces femmes qui ressemblent à des hommes ne s’est guère améliorée en Afrique du Sud. Celles qui exposent leur masculinité restent très mal vues et subissent des crimes ignobles. «Il faut arrêter cette hypocrisie, s’emporte Collen Lowe Morna, présidente de Gender Links, une ONG qui défend l’égalité entre les genres. Avec Semenya nous célébrons la différence, mais on continue à violer les lesbiennes pour les soigner de leurs maux…»
dimanche 22 août 2010
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