Diversité et parité : le "Sarkomètre" évalue l'action du chef de l'Etat
LE MONDE | 05.11.09 | 13h53 • Mis à jour le 05.11.09 | 14h25
Prendre au mot Nicolas Sarkozy : c'est le pari du Conseil représentatif des associations noires (CRAN) et de l'association féministe Mix-Cité, qui ont établi un "Sarkomètre" - un baromètre mesurant le degré de réalisation des promesses du candidat UMP en matière de parité et de diversité. Pendant la campagne présidentielle, Nicolas Sarkozy avait en effet défendu la "culture du résultat", appelant de ses voeux une République exemplaire qui sache rendre des comptes aux citoyens.
Sur le modèle de l'"Obamameter", un instrument qui mesure la réalisation des engagements du président américain, le CRAN et Mix-Cité ont dressé, à mi-mandat, un premier bilan de la présidence de Nicolas Sarkozy. "Après son élection, le chef de l'Etat avait annoncé que les membres du gouvernement seraient évalués par Eric Besson, alors ministre de l'évaluation et de la prospective, précise Louis-Georges Tin, le porte-parole du CRAN. Notre idée est tout simplement d'évaluer l'évaluateur."
Pour ce faire, les deux associations se sont fondées sur les réponses que le candidat avait faites, en 2007, aux questionnaires du CRAN et de l'Observatoire de la parité. M. Sarkozy avait alors pris onze engagements sur l'égalité hommes femmes - parité au sein du gouvernement, évolution du statut de l'élu, respect de l'égalité salariale - et treize sur la diversité - invention d'une "discrimination positive à la française", introduction de statistiques ethniques, généralisation du CV anonyme "là où elle est possible".
Deux ans et demi plus tard, le bilan est plus que mitigé : sur les vingt-quatre promesses faites par M. Sarkozy, le CRAN et Mix-Cité estiment qu'une seule - la réforme constitutionnelle sur la parité économique et sociale - a été "totalement tenue". Sur les autres engagements, le jugement des deux associations est sévère : onze des engagements sont classés dans les "réalisations peu avancées" et douze dans les "promesses pas du tout tenues".
Au-delà de la nomination, dans le premier gouvernement Fillon, de Rachida Dati, Rama Yade et Fadela Amara, les initiatives en faveur de la diversité piétinent : le CRAN estime que le gouvernement n'a pas fait grand-chose en matière de lutte contre les discriminations ou de rénovation des banlieues. "Les ministères ne sont même pas au courant des engagements du président !", sourit M. Tin en citant l'exemple de la création d'un grand centre des cultures noires sur le modèle de l'Institut du monde arabe.
Pour le CRAN, aucune des treize promesses de M. Sarkozy sur la diversité n'a été entièrement tenue ou n'est "assez avancée". Huit sont considérées comme "peu avancées". C'est le cas, par exemple, des statistiques de la diversité ou des mesures pour l'emploi comme la généralisation du CV anonyme ou le fait de réserver les marchés publics aux entreprises dotées du label "diversité". Cinq n'ont pas été "pas du tout tenues", qu'il s'agisse du droit de vote des résidents non communautaires aux élections municipales ou de la création d'un Centre international des cultures noires.
"Il a menti"
En matière de parité, le bilan est également considéré comme décevant. Pendant la campagne, M. Sarkozy s'était engagé à respecter la parité au sein du gouvernement. Ce fut fait pour le premier gouvernement Fillon, mais l'idée a été bien vite abandonnée : l'équipe actuelle ne compte que 34 % de femmes... Le ministère des droits des femmes n'a, en outre, jamais vu le jour, pas plus que la réforme du statut de l'élu qui devait "faciliter l'engagement politique des femmes" ou le "bonus financier" accordé aux partis qui comptent le plus d'élues.
Mix-Cité, une association féministe créée en 1997, considère qu'à part le principe de "parité économique", qui n'a encore été décliné dans aucune loi, le bilan à mi-mandat est décevant : trois des engagements de campagne de Nicolas Sarkozy sont "peu avancés" et sept n'ont "pas du tout été tenus". Au chapitre des déceptions, Mix-Cité classe l'absence de réduction des inégalités salariales - M. Sarkozy avait promis de sanctionner les entreprises fautives dès 2009 - ou l'abandon du droit opposable à la garde d'enfants, qui devait faciliter l'accès des femmes au marché du travail.
Pour les deux associations, le compte n'y est pas. "Nicolas Sarkozy a respecté les engagements envers les privilégiés comme le bouclier fiscal, mais il a menti envers les défavorisés, qu'il s'agisse des femmes ou des minorités visibles", estiment Thomas Lancelot et Samira Ouardi, pour Mix-Cité. Les deux associations demandent la création d'une coordination interministérielle chargée de veiller au respect des engagements pris par le président en matière de parité et de diversité.
Anne Chemin et Laetitia van Eeckhout
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