Leçon n° 1, branchez le fer à repasser
parité. Un stage de ménage réservé aux messieurs.
Libération du 21/01/2010
Henri, webmaster de 25 ans, en couple, est spécialiste «des miettes», et de pas grand-chose d’autre. Sébastien, gérant d’une agence immobilière, deux enfants, se vante d’être «très doué», pour tout faire rentrer dans le lave-vaisselle. Apparemment, c’est sa seule contribution aux tâches ménagères. Alain, peintre en bâtiment, dit qu’il ne trouve pas le ménage «rébarbatif», mais avoue : «La plupart du temps, c’est elle qui fait tout.» Il ajoute : «Quand elle a presque tout fini, je lui dis : 'Tu aurais dû me laisser faire.'»
«Tradition». Ils sont une dizaine. Pour eux, le ménage est une obligation, «enfin, une petite, parce que je n’en fais pas beaucoup», nuance un dernier. De bonne volonté, ils participaient hier à une formation intitulée «Tu seras un homme, chéri». Julien, un entrepreneur Internet de 31 ans, y a été poussé par sa femme : «Je ne sais pas plier une chemise, elle m’a dit : 'Vas-y tu seras un peu plus dégourdi.'» Au programme, repassage chronométré, lessivage du sol et nettoyage des vitres. Dans les règles de l’art. Parmi eux, un seul «maniaque» autoproclamé. «En ménage, il paraît qu’on est 'des taches'. On ne pouvait pas se laisser insulter», plaisante un responsable de Bien Servi, organisme de prestations de ménage à domicile qui, en proposant cette formation exceptionnelle réservée aux hommes, s’offre un coup de pub.
Il fait allusion à la une de Libération du 3 décembre, qui rappelait que les femmes assument, chaque année, 680 heures de travail domestique de plus que les hommes. Il insiste : «Ce n’est pas juste de le laisser faire aux conjoints.» Entendre : aux conjointes. Par exemple, chez François, qui a un enfant de 2 ans, «on n’est plus dans la vieille tradition française, mais c’est quand même ancré». Autrement dit : sa femme en faisait beaucoup plus… avant qu’ils ne prennent une femme de ménage.
Voilà ces messieurs qui écoutent religieusement un cours magistral sur le nettoyage écolo : les «3D» (détartrage, dégraissage, désinfection), le «cercle de Sinner», la méthode de «la godille». Tout cela ne dit rien à personne. ça vole haut, c’est pro. Certains opinent du chef, d’autres prennent des notes. Personne ne donne l’impression de perdre son temps. Les coups d’œil discrets au téléphone portable sont remis à plus tard. A la fin de la présentation, Alain entrevoit une lueur d’espoir : «On n’aspire plus, alors ?»
Compétition. Affublés d’un petit tablier, ils vont à l’atelier de repassage. Jean-Michel, un banquier de 47 ans, en couple depuis plus de vingt ans, dit qu’il ne fait «jamais le linge», mais n’a pas de «blocage pour laver la salle de bain, ou la cuisine». Le partage des tâches dans son couple est «essentiel à l’équilibre». Il faut dire que sa femme, avocate, «ne se laisse pas faire». Fer à repasser à la main, ils s’exercent sur des chemises froissées. Ils s’inspectent mutuellement. Dans la compétition ménagère, il y a quelque chose de viril qui leur plaît. Jean-Michel contemple sa chemise impeccablement pliée. Il sourit : «Elle est parfaite.»
charlotte rotman
mercredi 20 janvier 2010
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