Politiques 18/05/2010 à 18h57
Violences faites aux femmes: une grande cause qui avance à petite vitesse
Par LAURE EQUY
Egaré dans la navette parlementaire. La proposition de loi sur les violences faites aux femme, votée le 25 février à l’Assemblée nationale, attend toujours d’être examinée par les sénateurs. Un délai, certes, ordinaire pour le passage d’un texte d’une chambre à l’autre. Sauf que son sujet a été déclaré «grande cause nationale» de l’année 2010 et que la proposition de loi, objet d’un consensus droite-gauche, avait été adoptée à l’unanimité par les députés.
Le réseau associatif Osez le féminisime, plusieurs parlementaires et la secrétaire d’Etat, Nadine Morano, ont interpellé le Sénat et le ministre des Relations avec le Parlement, Henri de Raincourt, pour qu’il passe à la vitesse supérieure, le texte ne figurant toujours pas à l’ordre du jour. Leur crainte: qu'il ne soit pas étudié avant la fin de la session, ce qui repousserait son passage, au mieux, à la rentrée. La conférence des présidents du Sénat se réunit aujourd'hui, mercredi, pour compléter son ordre du jour jusqu’à la fin juin.
«Les faits démontrent qu’il y a urgence»
«Les faits nous démontrent qu’il y a urgence», a soulevé, la semaine dernière, Nadine Morano qui a téléphoné au président du Sénat, Gérard Larcher, et à Henri de Raincourt. La présidente du groupe communiste et P arti de gauche, Nicole Borvo Cohen-Seat, a formulé la même demande, pointant elle aussi «l’urgence».
C’est d’abord Osez le féminisme qui a interpellé le Sénat, rappelant au passage le gouvernement à ses engagements, une adoption avant l’été. «Au Sénat, les violences faites aux femmes passent à la trappe», a dénoncé mercredi dernier, dans un communiqué, le réseau, alerté par plusieurs parlementaires, dont la députée (PS) Danielle Bousquet. «Je veux bien entendre qu’il y a des difficultés techniques, mais il est question de vie et de mort: en France, une femme meurt tous les deux jours et demi sous les coups de son conjoint», plaide Caroline de Haas, animatrice d’Osez le féminisme, qui vient de lancer une campagne Internet pour relayer la demande directement auprès de Larcher.
«L’argument de l’encombrement ne tient pas»
La proposition de loi, présentée par Danièle Bousquet et l’UMP Guy Geoffroy, instaure deux mesures phares: la création d’une «ordonnance de protection» qui permettrait d’intervenir en amont d’un dépôt de plainte, et d’un délit de violence psychologique au sein du couple.
Pourquoi le texte n’a-t-il pas trouvé un créneau au Sénat? Du côté de la Haute Assemblée comme du ministre du Parlement, on invoque un agenda parlementaire chargé. «La proposition n’a pas été oubliée du tout, le vote à l’Assemblée est tout de même récent. Mais le calendrier est extrêmement serré et le gouvernement doit inscrire une série de textes lourds», justifie-t-on.
Mais pour un collaborateur d’une parlementaire qui suit de près l’évolution d’un texte, «l’argument de l’encombrement ne tient pas», le texte, consensuel, n’exigeant pas une durée très longue de débats: «Il a été examiné en une séance à l’Assemblée.»
«Préserver la nature transpartis du texte»
«Le gouvernement reporte la responsabilité sur les groupes. Il estime que c’est à eux de se saisir du texte car il est d’initiative parlementaire. Or, les groupes voudraient préserver sa nature transpartis», raconte-il encore. Inscrire ce texte dans la niche parlementaire d’un groupe reviendrait donc à le cantonner à une couleur politique.
Malgré cette étroite fenêtre de tir, les parlementaires engagés sur les questions de droits des femmes, se veulent optimistes sur la possibilité d’adopter la proposition de loi avant l’été. C’est le cas de la sénatrice PS, Michèle André, qui a écrit au président du Sénat et appelle à une «cohérence entre l’annonce de grande cause nationale» et les actes. La députée (UMP) Chantal Brunel: «C’est vrai qu’il y a des urgences, mais ce texte fait consensus et est très attendu. On ne peut pas ne pas le faire passer dans cette session.» «Il n’y a pas de raison de paniquer, le Sénat est mobilisé là-dessus», rassure, par contre, une autre sénatrice.
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